Parfois rares, souvent drôles, toujours de bon augure : découvrez ici les oiseaux qui nous ont rendu visite

Comme chaque année, deux couples de Bihoreaux gris ont niché dans la héronnière. Les oiseaux adultes y sont observés pour la première fois le 10 mai. Des transports de matériaux de construction du nid sont vus le 14 mai et le 4 juillet, et un nourrissage le même jour. 

Mais les oiseaux finissent par être de plus en plus discrets. Pluies et coups de vent de juillet nous font craindre un total échec de la reproduction… Et pourtant, le samedi 21 août, lors du premier stage ornitho de l’année, trois jeunes Hérons bihoreaux sont observés en vol toute la journée ! Un juvénile stationne régulièrement au poste 10, ou aux abords du petit plan d’eau près de la mangeoire. Les petites plumes duveteuses sur la tête, lui donnant un certain « style punky », laissent présager un envol tardif, signe probable d’une couvée de remplacement

Grand amateur de batraciens, discret et appréciant les endroits ombragés, ce petit héron crépusculaire aux yeux rouge cerise pour l’adulte se nourrit surtout en soirée et de nuit. Son vol souple au ralenti avec des ailes arrondies fait d’ailleurs penser à celui d’un rapace nocturne.

Le Bihoreau gris reste un héron plutôt méridional, rare en Picardie où il niche quasiment exclusivement sur le littoral et en haute vallée de la Somme. La population française fluctuante est de l’ordre de 3400 couples surtout en vallée de la Garonne, en Camargue, ou dans la plaine du Forez.

Texte : Philippe Carruette / Illustrations : Jean-Paul Cousin, Cécile Carbonnier

Samedi 24 juillet, le premier Balbuzard pêcheur est observé en baie de Somme et survolant le Marquenterre. Ce petit aigle pêche aussi bien en mer que sur les lagunes du Parc. Grâce aux bagues couleurs posées sur les poussins au nid, on sait que les oiseaux observés sur notre littoral peuvent venir du nord de l’Allemagne ou d’Angleterre, où des individus ont été réintroduits depuis les populations écossaises. 

Ce passage migratoire peut commencer dès mi-juillet (15 juillet en 2005, 25 juillet 2015, 12 juillet en 2016) avec des oiseaux immatures, ou des adultes ayant échoué dans leur nidification ou non reproducteurs. Aux mois d’août et de septembre, on peut assister, certaines années, à de spectaculaires scènes de pêche – jusqu’à 4 oiseaux juvéniles ensemble en septembre 2016 – au poste 1, avec la capture de Mulets. Leur présence va se poursuivre jusqu’à début octobre avec d’exceptionnelles observations hivernales (une le 17 décembre 2012). 

L’augmentation des durées de stationnement de juvéniles pourrait un jour amener à une future nidification de cette espèce en extension en France continentale, qui niche au plus proche dans l’Essonne. Néanmoins, les observations et surtout les stationnements prolongés de printemps restent encore peu fréquents.

Texte : Philippe Carruette / Illustration : Eugénie Liberelle

Les premiers cigogneaux ont quitté le nid le 6 juillet. La semaine du 20 au 26 juillet, très ensoleillée, semblait favorable au départ de tous les juvéniles vers la péninsule ibérique, voire l’Afrique de l’Ouest. D’habitude, après le 20 juillet, la majorité des jeunes ont fait leurs adieux au Parc. Mais cette année les oiseaux ont pris beaucoup de retard…

Retard « corporel » d’une part, du fait du manque d’alimentation dû aux gelées tardives, et aux fortes pluies et tempêtes en mai. Retard « sportif » d’autre part : on remarquait bien que les entraînements au vol des cigogneaux étaient moins fréquents que les années précédentes, comportement pourtant indispensable à l’acquisition de la maîtrise de leurs grandes ailes, et au succès des premiers envols. De plus, beaucoup de nids n’abritaient qu’un seul jeune, qui faute d’émulation s’exerçait avec moins d’assiduité qu’une nichée de quatre ou cinq ! 

La semaine capricieuse de fin juillet, avec rafales et forte pluviométrie, ne motive pas encore au départ. Les Cigognes ont besoin de courants d’air chaud et de bons vents porteurs pour utiliser le vol plané, vital pour elles. Peu musclées, le vol battu reste en effet très limité en durée, et fort consommateur d’énergie pour cette espèce.  

Texte : Philippe Carruette / Illustrations : Nathanaël Herrmann

Le Grimpereau des jardins est certes localisé, mais assez commun sur le Parc en période de nidification, où la ponte commence fin avril, souvent dans un nid bien dissimulé entre le tronc et son écorce décollée. Des couples peuvent aussi occuper les nichoirs adaptés à l’espèce, ou bien s’installer dans la charpente du toit de certains postes d’observation. Ils sont surtout présents autour du pavillon d’accueil, au fond des parkings et à la héronnière, où se trouvent les arbres les plus gros sur le tronc desquels les petits passereaux aux pattes courtes et aux doigts longs et griffus peuvent grimper en colimaçon. Le bec arqué du Grimpereau est particulièrement fonctionnel pour capturer petites araignées, chenilles et larves logés dans les crevasses des écorces

C’est en mars, avec le chant, et fin juin début juillet, quand les jeunes quittent le nid, qu’il est le plus remarqué sur les secteurs forestiers. Son dos a d’ailleurs la couleur de l’écorce des arbres et les rectrices rousses de sa queue sont rigides, pour assurer une plus grande adhérence au support. Un vrai passionné des arbres !

Texte et illustration : Philippe Carruette

Depuis quelques jours, un jeune Héron garde-bœufs se nourrit dans la panne juste devant la Maison du Parc ! Il est fort probable qu’il soit né au sommet de la pinède qui abrite la héronnière, avec entre autres 14 couples de ce petit héron méditerranéen arrivé dans notre région comme nicheur en 1992. Les juvéniles sont peu farouches et n’ont pas (encore !) la crainte de l’Homme, d’autant qu’ils sont nés à 25 mètres de haut, entourés de spatules, aigrettes – grandes et garzettes – ou cigognes. 

Cela a fait le plaisir de nos groupes de maternelles, qui ont pu observer de très près et sans aucun dérangement la manière dont cet “ado” d’oiseau sauvage apprend la vie et fait son « marché » ! Il est en effet passionnant de voir comment, à la manière de Kaa le python du Livre de la Jungle de Rudyard Kipling, il oscille sa tête, yeux hyper attentionnés, pour ajuster au mieux la frappe de son bec sur un petit Crapaud commun, une sauterelle ou un criquet. Si la pratique de la chasse est innée chez les grands échassiers, il faut bien apprendre, mémoriser échecs et réussites pour sans cesse améliorer ses techniques. L’inné sans l’apprentissage conduit à l’échec perpétuel et à une fin tragique… Mais notre jeune gardien semble être un élève studieux et efficace ! N’oubliez pas de lui réserver un instant d’observation à votre arrivée, nul doute qu’il vous en sera reconnaissant 🙂

Texte et illustrations : Philippe Carruette

Depuis le 12 juin 2021, un mâle immature d’Harelde boréale stationne au poste 4. Il commence à acquérir sa belle livrée nuptiale, avec l’apparition progressive des longues plumes de la queue. Ce petit canard plongeur, semblant de loin noir et blanc, niche sur les zones montagneuses de la toundra scandinave – Islande comprise – au niveau du cercle polaire, jusque dans le nord de la Sibérie. On le retrouve aussi en Alaska et dans le nord du Canada, où il est très abondant, d’où son ancien nom d’Harelde de Miquelon. Il hiverne en mer Baltique et en mer du Nord, notamment dans le golfe de Botnie, où il se nourrit de mollusques et de crustacés en s’aidant en plongée de ses ailes qui lui permettent de descendre à plus de 50 mètres de profondeur, n’hésitant pas à se déplacer sous la glace. Malgré cette abondance nordique, il est bien peu observé en France avec souvent moins de 70 mentions par an, surtout d’octobre à avril. Bien des oiseaux doivent néanmoins passer inaperçus en haute mer.

Au Parc, l’Harelde boréale est vue depuis 1985 pratiquement tous les deux ans, avec une recrudescence des observations ces dernières années. Une des particularités du site est le nombre de données d’individus qui séjournent sur de longues périodes, notamment des mâles en juin. La surprise en 2019 fut la nidification réussie de l’espèce – une femelle avec 4 canetons – aux Pays-Bas, à plus de 700 km au sud des sites de reproduction scandinaves les plus méridionaux ! Pour l’instant au Parc du Marquenterre, nous n’avons assisté qu’aux parades nuptiales insistantes d’un mâle isolé, en juin 1992, sur des femelles de… Tadorne de Belon (faute de mieux !) qui, visiblement,  n’appréciaient guère !

Texte : Philippe Carruette / Illustrations : Léa Coftier

Une petite colonie de 14 couples de Grèbes à cou noir s’est installée très rapidement le long des berges du poste 2 pourtant en eau saumâtre. Comme à son habitude, cet oiseau cherche le contact des colonies de laridés comme protection contre les prédateurs, leur alerte permettant aux adultes de mettre des algues sur leurs œufs avant de quitter le nid et d’aller à l’eau. Les nids sont très proches les uns des autres et formés d’une modeste plateforme de végétaux construits “à la va-vite”. Après une incubation de 22 à 25 jours, les poussins sombres à rayures de pyjamas passent souvent beaucoup de temps sur le dos des deux parents. Plus que du poisson, la base du régime alimentaire est constituée de têtards et de larves d’insectes aquatiques. 

Cette notion forte et stimulante de colonie explique sûrement la difficulté d’installation des couples isolés sur les autres postes. Le Grèbe à cou noir est peu abondant en France (où il est apparu comme nicheur qu’en 1909) avec seulement 2000 couples, principalement en Brenne, Dombes et Sologne. Il niche pour la première fois en Picardie en 1983 avec trois couples dans le marais de Rue. Ce sont les lieux artificiels comme les bassins de décantation encore en activité ou bien reconvertis, comme les sites de Grand Laviers et de Thumeries, qui sont devenus des lieux de nidification importants dans les Hauts-de-France pour ce bel oiseau aux yeux rouges entourés de favoris d’or.

Texte : Philippe Carruette / Illustrations : Maëlle Hello, Nathanaël Herrmann, Eugénie Liberelle

 

« Clicli cli », cliquetis des appels des Oies rieuses. Des passages nocturnes ont eu lieu ces jours derniers avec l’arrivée de la neige en Pologne et en Allemagne du nord. Ces oies nous arrivent au départ de la lointaine Sibérie (presqu’île de Taïmyr et de la Kolyma…) et quelques petits groupes vont hiverner sur le Marquenterre. Adeptes du « régime herbivore » elles vont chercher en priorité les grandes prairies humides des postes 7 et 8 en compagnie des Oies cendrées. Un tel effectif en hivernage n’avait pas été noté sur le parc depuis la vague de froid de 2009 (38 le 3 janvier et 93 le 25 janvier 2009). On est bien loin tout de même des milliers d’Oies rieuses qui hivernent aux Pays Bas et sur les polders belges tout proches.