Parfois rares, souvent drôles, toujours de bon augure : découvrez ici les oiseaux qui nous ont rendu visite

Appartenant à famille des Apodidés, le Martinet noir (Apus apus) se rapproche des colibris d’un point de vue classification. Cet oiseau est tout noir, à l’exception du dessous des ailes et de sa bavette qui paraissent grisâtres. Sa queue est très fourchue. Doté d’un corps aérodynamique avec des ailes en forme de faux, il est taillé pour le vol.  Ses pattes très courtes l’empêchent presque de se poser. 

Il est reconnaissable aussi à son cri très strident faisant un peu penser à des enfants jouant dans une cour d’école…

Cet oiseau aux caractéristiques morphologiques hors du commun ne se pose pratiquement jamais. En effet, il fait quasiment tout en vol : se reproduire, dormir, se nourrir. Il ne se pose qu’au moment de la ponte et de la couvaison des œufs, et du nourrissage des juvéniles. 

Il choisit des zones lui permettant de s’envoler facilement, notamment les cavités naturelles comme les falaises et les grottes, mais aussi les lieux d’origine anthropique comme les porches des maisons. De un à quatre œufs  blancs et oblongs sont couvés à tour de rôle par les deux adultes pendant 20 jours. Les jeunes s’émanciperont au bout d’une quarantaine de jours.

Le régime alimentaire du martinet noir est exclusivement constitué de plancton aérien qu’il attrape aisément grâce à son bec très largement ouvert.

Arrivant chez nous à partir du mois d’avril de ses quartiers d’hivernage au sud de l’équateur, il repart mi-juillet début août. Une belle performance pour un poids oscillant entre 38 et 45 g !

Texte et illustration : Foucauld Bouriez

Le Rossignol philomèle (Luscinia megarhynchos) appartient à la famille des Muscicapidés. Il ressemble beaucoup à son cousin le Rougegorge familier (Erithacus rubecula),  par le port dressé de sa queue. Les parties supérieures ainsi que le croupion sont roux. Les parties inférieures sont blanchâtres, mais un bandeau brun-roussâtre orne sa poitrine et ses flancs. Son œil noir assez grand est entouré d’un cercle oculaire blanc-crème bien visible.

Il apprécie particulièrement les forêts aux peuplements jeunes. Les corridors écologiques comme les écotones  (lisières) ou les haies le long des zones humides riches en végétation épaisse lui conviennent également.

Le mâle ne se pose jamais au sommet pour chanter, contrairement à d’autres espèces. Cela rend plus compliquée son observation. Il faut le chercher dans les feuillages

Revenant d’Afrique subsaharienne à partir de la seconde décade du mois d’avril, il aime annoncer  son arrivée par un chant flûté. Le mâle très territorial chante de jour comme de nuit ; d’où son nom en anglais : « Nightingale ». 

Son régime alimentaire insectivore est majoritairement constitué de coléoptères et de fourmis capturés au sol. En été, avant son grand voyage, il complète son menu avec des baies bien mûres qui sont riches en oxydes de fer.

Un couple de rossignol peut avoir jusqu’à deux couvées dans la saison. Le nid est construit dans la végétation basse proche du sol. Quatre à cinq œufs olive tachetés de rougeâtre sont couvés pendant treize jours. Les juvéniles seront indépendants seulement à l’âge d’un mois.

Texte et illustration : Foucauld Bouriez

Plus petite, plus fine et plus discrète que sa cousine la Tourterelle turque, la Tourterelle des bois nous revient de ses aires d’hivernages depuis quelques semaines. Malgré son plumage assez reconnaissable avec un dos roux clair, c’est souvent au chant que nous repérons sa présence, un roucoulement s’étalant sur 3 temps de notes continues et similaires. 

Celle-ci garde facilement ses distances vis-à-vis de l’Homme, contrairement à la Tourterelle turque qui est bien plus anthropophile. Elle est donc plus farouche durant toutes les phases de sa vie. 

Elle est strictement migratrice et nous quitte pour les territoires de la bande sub-saharienne pour l’hiver. Par ailleurs, contrairement au Pigeon ramier qui fera de belles migrations groupées, la Tourterelle des bois migrera seule ou par petit groupe, donc beaucoup plus discrètement. 

Cette espèce classée vulnérable et en diminution de 78% depuis 3 à 4 décennies, est toujours chassée lors de ses migrations, ainsi que sur ses aires d’hivernages. La diminution de milieux favorables à sa nidification, particulièrement à cause de la destruction des haies et l’utilisation d’intrants en agriculture, participe aussi à sa disparition sur notre territoire. 

Nous sommes donc toujours heureux d’entendre et de noter toute présence de cette espèce sur le Parc. Une parade et un accouplement ont même été aperçus dernièrement !

Texte : Raphaële Thilliez / Illustration : Foucauld Bouriez

Les couples de Cigognes blanches ont en ce moment leurs poussins… Le torchon rouge à carreau est de mise pour cette espèce chargée de symboles, à la fois porte-bonheur et emblème de la migration.

Les premières naissances ont été repérées vers le 15 avril sur le Parc, lorsqu’un adulte debout sur le nid, bec ouvert, régurgite un liquide épais constitué de la nourriture pré-digérée. Des attitudes particulièrement attentionnées de l’adulte, comme son extrême précaution lorsqu’il pose ses grandes pattes dans le nid, sont aussi un bon critère pour déceler les petits sans encore les apercevoir. 

Ils seront visibles une dizaine de jours plus tard, quand ils commenceront à lever la tête pour réclamer. Demandez aux guides avec leur longue-vue de vous les montrer, notamment à la héronnière. Bon, autant prévenir tout de suite, ils ne sont pas des canons de beauté… Grisâtres, au bec noir, leur duvet est souvent peu rutilant avec ces périodes de froid et d’humidité qui ne maintiennent pas le nid très sec !

Des mythes orientaux complexes sont probablement à l’origine de la légende occidentale qui veut que la cigogne amène les enfants. Elle a ensuite voyagé partout en Europe, mais elle est souvent absente des régions où on ne trouve pas naturellement le grand échassier, comme en Scandinavie. En Alsace, la cigogne apporte les bébés dans la tambote (le tonneau à choucroute…!) de la sage femme. Lorsqu’un enfant laissait un morceau de sucre sur le rebord de la fenêtre à Imling au sud de Sarrebourg, la cigogne était attirée… et apportait un nouveau-né. Faut-il y voir là une version de notre petit rongeur avec la dent de lait et une pièce en récompense ?

Alors quand nos sympathiques collègues des Jardins de Valloires vont vous annoncer la naissance de bébés dans leurs magnifiques roseraies… croyez plutôt les cigognes !

Pour tout savoir sur les cigognes, un ouvrage de Pascal Etienne : La Cigogne blanche aux éditions Delachaux et Niestlé (épuisé mais on en trouve encore chez différents diffuseurs et solderies). 

Texte : Philippe Carruette / Illustrations : Jean Bail

Mai est le mois des voyages au long cours pour une myriade de petits échassiers – les limicoles – qui remontent depuis l’Afrique de l’Ouest vers le nord de l’Europe, faisant une halte au Marquenterre : Pluviers argentés en route vers le cercle polaire, Barges à queue noire vers l’Islande, Bécasseaux cocorli vers la Sibérie, Courlis corlieu vers la Norvège… L’occasion pour nous de nous pencher quelques instants sur le bec de ce dernier.

Non, le courlis n’a pas développé un bec courbé pour mieux attraper les vers arénicoles (vers de vase) ! Du moins, ce n’est pas exactement comme cela que les choses se sont déroulées… Pour en arriver à une telle particularité, des milliers d’années se sont écoulées et tout a commencé par hasard

Ce hasard correspond à une mutation purement aléatoire de l’ADN d’un individu. Par chance, cette mutation confère à notre courlis la capacité d’aller chercher des vers où aucun autre oiseau n’en était capable avant, dans des cavités en U. Étant mieux nourri, notre courlis à considérablement augmenté son succès reproducteur et a donc pu transmettre sa mutation à sa descendance. 

Si ce même changement (même mutation) est opéré chez plusieurs individus sur plusieurs générations, alors cette mutation peut se fixer dans la population et tous les courlis finissent par développer un bec courbé ! 

Texte : Jean Capelle / Illustration : Nathanaël Herrmann

Au point de vue en matinée résonnent les miaulements des Mouettes mélanocéphales. Certaines remontent vers le nord (puisqu’on est en migration prénuptiale), d’autres descendent étonnement vers le sud ! Sur la grande colonie nicheuse du poste 2, les effectifs changent tous les jours, avec des pics en soirée. Bref ces oiseaux ont la bougeotte en permanence. 

Il y a quelques années, on pensait qu’elles cherchaient à s’installer sur les colonies les plus productives, celles à gros effectifs comme la zone industrielle d’Anvers en Belgique (plus de 4000 couples) mais les oiseaux bagués et leurs comportements ont éclairé nos lanternes et nous ont permis de « penser mouette »… 

Nos Mouettes rieuses nicheuses arrivent du centre de l’Espagne, pour beaucoup déjà en couple, sur les ilôts où elles ont réussi leur reproduction l’année précédente. Tout est immédiatement bien rangé, avec les distances de tolérance entre chaque idylle, même si les cris grinçants résonnent de partout, notamment avec les différends entre les voisins (toute ressemblance avec une espèce bien connue est indépendante de notre volonté…). 

Pour la Mouette mélanocéphale c’est différent : on arrive en solo, en groupes disparates, de partout, c’est-à-dire de toute l’Europe, en mode nomade. Le but : se poser sur des endroits où il y a des collègues et retrouver… son compagnon ou sa compagne de l’année dernière. ! Et pour cela au diable la sobriété énergétique, on va parcourir des centaines de kilomètres et visiter en mars-avril les meilleurs spots de rencontres d’Europe, pour arriver à ses fins. 

Les grandes colonies belges, hollandaises et françaises comme celles  de Seine-et-Marne, de Blois (Loir-et-Cher), de Noirmoutier (Vendée), la lagune de Bouin, ou encore le Marquenterre sont un must à ne pas rater pour trouver l’âme sœur. Un véritable « meeting-spot » pour Mouette mélanocéphale ! 

Ce sont les oiseaux bagués qui nous ont progressivement révélé leurs secrets intimes. Et puis les discussions entre passionnés de ces oiseaux (Merci Camille Duponcheel, Alain Le Dreff, Régis Marty… et tant d’autres) ! Quelques exemples concrets de curriculum vitae de Mouettes mélanocéphales globe-trotteuses en 2024 :

  • 3LEV blanche : baguée sur l’usine Total d’Anvers (Belgique) le 14 mai 2015. Elle est sur le Parc le 8 et 10 mars 2024, du 14 au 19 mars en Zélande à Sluis (Pays-Bas) et elle revient au Marquenterre le 20 mars !
  • 3JN1 blanche : baguée aussi à Total Anvers est du 10 au 20 mars 2024 à Terneuzen en Zélande et redescend sur le Marquenterre le 1er et 2 avril.
  • 3HKL : baguée le 14 juin 2014 à Beveren (Belgique) est le 31 mars 2024 sur la colonie de Blois (Loir-et-Cher) et le 7 avril 2024 au Parc.

Texte : Philippe Carruette / Illustration : Alexander Hiley

La Fauvette babillarde (Curruca curruca) est un passereau appartenant à la famille des Sylviidés. Elle est la plus petite des quatre espèces de fauvettes d’Europe tempérée. Son dos d’un brun foncé et sa tête gris foncé la distinguent aisément de ses cousines. Son ventre est blanc nuancé de chamois. Les lores (partie entre les yeux et les narines) sont noirs. 

Elle est surtout reconnaissable à son chant, qui commence par un babil évoquant vaguement la Fauvette des jardins (Sylvia borin), suivi d’une même note répétée 6 ou 8  fois, caractéristique. 

Cet oiseau a des mœurs plutôt discrètes car vivant dans les lisières et les haies avec des arbustes épais. Dans les massifs dunaires, elle affectionne particulièrement les bosquets d’argousiers . C’est un passereau essentiellement insectivore : son départ à l’automne est donc plus précoce que celui des passereaux granivores.

Contrairement à la Fauvette à tête noire (Sylvia atricapilla), elle est nettement plus territoriale. Les couples au moment de la période de nidification sont éloignés les uns des autres.

Les premiers nicheurs arrivent dès avril. Le nid est construit par les deux partenaires à faible hauteur avec des brindilles liées par de la soie d’araignée. Le fond du nid est tapissé de poils où sont pondus de trois à sept œufs crème tachetés de brun. La durée d’incubation est brève : onze à douze jours seulement. Les jeunes s’émancipent trois semaines plus tard.

Son aire de répartition géographique s’étend de l’Angleterre jusqu’au nord de la Chine. Très présente en Asie, c’est la plus orientale des quatre espèces de fauvettes d’Europe tempérée. 

Texte et illustration : Foucauld Bouriez

Appartenant à la famille des Podicipédidés, le Grèbe à cou noir (Podiceps nigricollis) est une des trois espèces de grèbe présentes sur le parc du Marquenterre. Il est caractérisé, comme tous les représentants de sa famille, par un corps fuselé avec une position basse sur l’eau, et un long bec pointu. Ses pattes sont positionnées très en arrière du corps, d’où son appellation locale de « pattes au cul » ! Concernant sa taille, il se situe entre le Grèbe huppé (Podiceps cristatus) et le castagneux (Tachybaptus ruficollis). Son corps est complètement noir, excepté les flancs qui sont châtain clair. Il est doté de favoris jaune vif (grands sourcils) et ses yeux sont rouge sang.  

Le Grèbe à cou noir vit sur les plans d’eau pourvus d’une abondante couverture végétale hélophyte, plantes ayant uniquement leur système racinaire sous l’eau, la partie aérienne tombant au moment de l’automne (les joncs par exemple). Les plans d’eau doivent être de grande taille et riches en ichtyofaune (poissons), même si  les macros-invertébrés  sont grandement appréciés.

Cet oiseau est particulièrement grégaire durant l’hiver, où des regroupements de plusieurs milliers d’individus sont régulièrement observés. Ainsi, le lac de Burdur situé en Turquie a déjà accueilli jusqu’à 180 000 individus

Les couples restent unis lors de la période de reproduction, qui s’étale d’avril à août dans l’hémisphère nord. Le Grèbe à cou noir a l’habitude de nicher en périphérie des colonies de Mouette rieuses. Cela lui octroie plus de sécurité durant la période d’incubation des œufs. Les parades nuptiales sont vraiment belles à observer. Les deux partenaires se font face et se redressent, chacun en bombant le torse, puis émettent de puissants sifflements

On peut les apercevoir avec une algue dans le bec quand ils sont prêts à construire le nid, structure flottante arrimée à la végétation ; il est construit par les deux partenaires. La femelle pond en moyenne de deux à six œufs blanc bleuté couvés à tour de rôle par les deux adultes pendant trois semaines. Ils deviennent bruns sous l’effet de la décomposition des algues. Les juvéniles  voyagent sur le dos des adultes les premiers jours. Ils commencent à plonger à dix jours. 

Le Grèbe à cou noir est présent sur les quatre continents. Autrefois, cette espèce était absente du Parc. Les effets de plus en plus prononcés du changement climatique ont modifié son aire de répartition vers le nord de l’Europe. La population Française est estimée à environ 1200 couples nicheurs… ce qui fait de lui une espèce assez rare.

Texte et illustration : Foucauld Bouriez