Lors de votre venue sur le Parc ou même juste sur le parking, vous avez peut-être croisé ces chevreuils / moutons / biches / chevaux / chèvres sauvages / bouquetins / très petites vaches (toutes ces suggestions sont issues de paroles de visiteurs incrédules de ces rencontres). Mais alors, que sont vraiment ces mammifères bruns, parfois cornus, parfois farouches et parfois en grand troupeau dans les prés-salés de la Baie de Somme?

Ce sont des Mouflons de Méditerranée, qui ont fait un long voyage depuis leurs îles d’origine, la Corse et la Sardaigne, jusqu’en Picardie dans les années 1980. Introduits à l’origine pour pallier la disparition des lapins dans les dunes due notamment à la myxomatose, ils devaient brouter l’espace dunaire pour limiter la prolifération de l’argousier notamment, et ralentir la fermeture du milieu causée par la pousse des arbustes. 

Aujourd’hui bien installée, la population de mouflons de la Baie de Somme compte plusieurs centaines d’individus qui peuvent se regrouper en immenses troupeaux dans les prés-salés. Quelques individus peuvent aussi entrer sur le Parc du Marquenterre et brouter dans les prairies ou se cacher dans la pinède. 

Les mouflons appartiennent à la famille des moutons, c’est une sous-espèce sauvage du mouton domestique, les mâles sont donc appelés béliers et les femelles, brebis. Comme ses cousins d’élevage, le bélier porte des cornes recourbés qui peuvent être importantes car elles grandissent en permanence, contrairement aux bois des cervidés qui tombent chaque année. Leur pelage est brun, généralement plus clair chez les femelles et les juvéniles mais ils ne sont pas couverts de laine comme les moutons domestiques. 

Attention, le Parc du Marquenterre renferme également trois moutons d’Ouessant, domestiques, reconnaissables à leur laine noire ou grise et présents dans la pâture proche du poste 1. Ces trois béliers sont ici pour l’éco-pâturage et ne quittent que très rarement leur prairie.

Texte : Ombeline Duval / Illustrations : Alexander Hiley

Le Lérot commun (Eliomys quercinus) est un petit mammifère dont le poids oscille entre 60 et 140 grammes. Il est doté d’un masque facial noir lui donnant des airs de bandit de grands chemins, et le contraste est marqué entre son ventre blanc et son dos gris-brun. À noter que ce petit rongeur possède à la fois des incisives et des canines, comme les carnassiers. Il appartient à la même famille que le Loir gris, les Gliridae, mais ce dernier est nettement plus grand. 

Le lérot possède un espace vital d’au moins 150 mètres qu’il défend farouchement. On le rencontre partout en Europe, sauf en Scandinavie, et aussi sur une partie du continent asiatique, où il fréquente aussi bien dans les vergers dotés de vieux arbres creux que les jardins et parcs. C’est un animal cavernicole qui affectionne également les habitats anthropiques, tout particulièrement les greniers et les charpentes où il peut aisément bâtir son nid, notamment pour hiberner. Les postes d’observation du Parc lui conviennent également. C’était la surprise au poste 7 de le découvrir pour la première fois ! 

Il a des mœurs principalement nocturnes. C’est à ce moment-là qu’il sort de sa cachette pour s’alimenter. Son régime alimentaire est assez diversifié, comprenant des fruits et des baies qu’il agrémente d’insectes, voire d’autres petits animaux. Il est observé chez cet animal des cas de cannibalisme fréquents en fin d’hibernation.

La femelle a une seule portée par an allant de deux à sept petits qui naissent nus et aveugles. La reproduction bat son plein en avril-mai avec une durée de gestation de trois semaines. Les jeunes atteindront leur maturité sexuelle à trois ou quatre ans. Ses principaux prédateurs sont la fouine et les rapaces nocturnes que sont les chouettes et les hiboux.

Texte et illustration : Foucauld Bouriez

Le Parc du Marquenterre est réputé pour l’observation des oiseaux, mais il abrite également une flore et une faune aussi remarquables que diversifiées. Parmi les animaux les plus discrets, on retrouve l’Écureuil roux, ce petit acrobate aux oreilles poilues, qui voltige d’arbre en arbre en quête de rencontre et de nourriture…

Carte d’identité

L’Écureuil roux (Sciurus vulgaris) est un petit mammifère de la famille des Sciuridés – du grec « skiouros » qui signifie “celui qui se met à l’ombre de sa queue”. Ce rongeur d’une taille allant de 20 à 25 cm est arboricole : il fréquente les bois, parcs et forêts. Sa couleur varie du roux clair au brun-noir selon les individus, le ventre lui est toujours blanc. Espèce farouche, il faudra beaucoup de patience et un peu de chance pour l’observer sur le Parc, le matin étant le moment le plus opportun pour l’apercevoir. On peut toutefois repérer plus facilement ses indices de présence au pied des pins laricio par exemple, comme les restes de repas (cônes de pin épluchés).

Droitier ou gaucher ?

Anecdote étonnante, ce petit lutin épluche les cônes de pin avec soin. Saisissant les pommes de pin entre ses mains, il enlève avec ses dents écaille par écaille afin de déguster les précieuses graines. En hiver, ce petit gourmand est capable de manger jusqu’à 190 pommes de pin par jour. On retrouve au sol des cônes hérissés de lambeaux comprenant une base effilochée et un pinceau d’écailles au sommet. Pour comparer les restes du cône mangé par un mulot, il sont bien plus nets (pas de lambeaux), on retrouve une base arrondie, bien rongée, et plus d’écailles au sommet. 

En tant que futur expert de la nature, amuse toi à percer les secrets de l’écureuil afin de connaître ses préférences manuelles. En prenant le cône de pin de manière à avoir la pointe vers le bas, regarde si la partie effilochée des écailles rongées se trouve à droite (= écureuil droitier) ou à gauche (= écureuil gaucher).

Petit lutin menacé ? 

L’écureuil roux bénéficie du statut d’espèce protégée depuis plus d’une trentaine d’années ; cependant les effectifs peinent à s’accroître, dû à la fragmentation de ses milieux de vie et des nombreuses collisions sur la route. 

Au même titre que les oiseaux, on peut lui donner un petit coup de main au jardin. La création d’une mangeoire peut être une bonne idée, on l’agrémente d’un peu de nourriture (noix, noisettes, cônes et autres graines d’arbres, graines de tournesol et pourquoi pas des rondelles de carottes).

Ce mignon petit être est bien évidemment indispensable à l’équilibre de la vie, il joue un rôle dans la dissémination des graines et donc au rajeunissement de la forêt : continuons ainsi de le protéger !

Texte : Maxime Petit / Illustrations : Manon Prétot, Cécile Carbonnier, Estelle Porres 

Comme promis, voici une seconde vidéo réalisée par Théo, guide naturaliste pendant la saison 2023. Un beau travail d’investigations, de bibliographie, de montage vidéo, de patience…

Sans plus attendre, belle découverte ! 

 

Le 5 juillet 2022, un couple en visite sur le Parc nous fait part d’une observation exceptionnelle : entre les postes 10 et 11, un Putois (Mustela putorius) traverse le chemin à plusieurs reprises, portant chacun de ses 5 petits de l’autre côté ! Bien que cette espèce soit, d’après Philippe Carruette, responsable pédagogique, « de loin le Mustélidé le plus commun sur le site », son observation reste rare, d’autant plus avec des jeunes.

Arrêtons tout : qui est donc le Putois ?

Ce petit mammifère appartient à l’ordre des Carnivores et à la famille des Mustélidés, faisant de lui un cousin du Blaireau, de la Loutre ou encore de l’Hermine. Un crâne plat, de courtes pattes, et un corps cylindrique fuselé pour se faufiler partout – y compris dans les terriers de ses proies, l’observateurice chanceux.se pourra le reconnaître de ses proches parents à son “masque de bandit”, dessiné par les poils sombres et clairs de son visage. Finalement, il ressemble en tout point au Furet, dont il n’est autre que l’ancêtre sauvage probable !

Bien que principalement associé aux zones humides, le Putois affectionne en réalité un mélange d’habitats y ajoutant des bocages et des boisements clairs à proximité. Il n’aime pas les forêts denses, l’altitude et les zones trop anthropisées (agglomérations et cultures intensives). Carnivore peu difficile, il y chasse principalement des rongeurs, des lapins et des amphibiens, et secondairement d’autres petits animaux. Crépusculaire et nocturne, plus rarement diurne, il est actif toute l’année mais réduit son activité en hiver. Il est solitaire hors période de reproduction, celle-ci ayant lieu de mars à avril.

Discret, solitaire, et jamais nombreux sur un secteur donné, il était bien méconnu jusqu’à peu. Lorsqu’il n’est pas relégué au rang des “nuisibles” par son image de petit prédateur puant (d’où provient d’ailleurs son nom putorius), certaines représentations populaires l’identifient à une autre espèce à la même réputation : la Moufette, résidente du continent américain appartenant à une toute autre famille encore…

Le Putois est désormais classé comme quasi-menacé sur la Liste rouge des mammifères continentaux de France métropolitaine. Son déclin, accentué par le peu d’études à son sujet, s’observe sur l’ensemble du pays et même du continent. Les causes sont multiples : perte de son habitat (urbanisation, agriculture), collisions routières, chasse et piégeage, déclin de ses proies (Lapin de garenne et amphibiens), maladies, empoisonnement, concurrence avec des espèces exotiques envahissantes…

Tout cela n’est pas arrangé par la méconnaissance et la mauvaise réputation de notre pauvre ami, qui n’est pourtant pas forcément avérée : ses sécrétions odorantes, certes fortes, ne sont émises qu’avec les excréments à des fins de marquage de territoire, ou alors en cas de fort stress – c’est un mécanisme de défense. Pour éviter un échantillon gratuit de parfum, il suffit donc d’éviter tout contact avec l’animal et ses excréments, ce qui est généralement recommandé pour tout animal sauvage. Quant à sa déprédation sur les élevages aviaires, elle n’est pas chiffrée officiellement à ce jour mais reste probablement minime, les oiseaux n’étant pas les proies principales du Putois. De plus, à l’inverse de certaines de ses cousines, le Putois n’est pas bon grimpeur – une bonne clôture devrait suffire à protéger les élevages.

Alors si vous souhaitez vous aussi donner un coup de pouce au Putois, la Société Française pour l’Etude et la Protection des Mammifères, réclamant la protection de l’espèce au niveau national, s’est penchée sur son cas et a publié plusieurs documents à son égard, dont des mesures de protection à votre échelle en résumé, que vous pouvez consulter sur leur site : https://www.sfepm.org/le-putois-deurope.html.

Qui sait, peut-être aurez-vous la chance de croiser ce discret voisin un jour… ou un soir !

Nous remercions chaleureusement Benoit Monard pour sa photo prise au Parc en 2015.

Texte : Garance Rousset / Illustrations : Garance Rousset, Benoit Monard

Des plumes, des plumes, mais pas que !! Et les poilus alors ? Dès que les visiteurs et le personnel ont déserté, de petits animaux très discrets profitent du calme dans les allées du parc. Les mammifères que nous apercevons le plus souvent sont les chevreuils, les sangliers ou encore les mouflons dans les prairies, or, de […]

Les sangliers sont fréquents même en plein après-midi sous la héronnière. Ils savent qu’ils peuvent trouver facilement des restes de nourriture tombés des nids des grands échassiers, mais aussi des cadavres de poussins tombés des pins notamment lors des coups de vent des ces derniers jours.

Mais depuis au moins deux ans, une femelle accompagnée de marcassins s’est spécialisée dans la capture des jeunes échassiers au sol. Spatules, aigrettes ou hérons qui réalisent leur premier vol, ont tendance à se poser au sol, l’atterrissage en altitude est souvent un moment délicat, surtout par grand vent. La femelle de sanglier a perçu ces proies faciles. Elle s’en approche avec calme, fouillant le sol comme tout bon sanglier omnivore.  Les jeunes échassiers nés à 25 mètres de haut ne connaissent guère encore les dangers terrestres, il faut tout apprendre, tout mémoriser ! Arrivée à faible distance, elle accélère et croque les juvéniles ! Le sanglier faute de crocs n’est pas fait pour tuer vite et pour capturer une proie. Il la presse et la broie alors dans ses mâchoires…

François Poidevin, ancien garde passionné de comportement du Domaine du Marquenterre, me relatait le cas d’une laie qui avait pris l’habitude de tuer et consommer des jeunes marcassins dans les compagnies. Ces comportements rares ne sont pas à généraliser à l’espèce, mais font l’objet d’individus qui se spécialisent dans un type de proie, de comportement, d’habitudes qu’ils ont expérimenté avec succès.

Emmanuelle Luissier guide naturaliste au Parc a pu photographier et filmer la capture d’une jeune spatule blanche, illustré ci-dessous.

Texte : Philippe Carruette / Illustrations : Alexander Hiley et Emmanuelle Luissier