Voilà un insecte coléoptère facile à reconnaître : le Clyte bélier  (Clytus arietis). Ses élytres jaunes et noires, qui protègent les ailes cachées en-dessous, sont bien visibles, le faisant ressembler à une guêpe. Ce déguisement est un bon moyen de dissuader les prédateurs, alors qu’il est totalement inoffensif : en un mot, un s’agit de paraître « méchant » quand on est un vrai « gentil » ! Le Clyte bélier se nourrit en effet sur les fleurs de pollen et de nectar, et ne tient pas en place, exactement comme son (top) modèle – à la taille de guêpe – carnivore, agitant ses antennes pour faire encore plus vrai ! On ne fait jamais à moitié son rôle d’imposteur ! 

L’adulte est visible de mai à août. Les larves se développent dans le bois mort durant deux ans. Il est commun en France. Un individu était présent sur le Parc le 6 juin 2021, un autre le 14 juin ; cette espèce avait déjà été mentionnée en 2019 par Romane Sauleau, guide naturaliste du littoral, dans son inventaire dans le cadre de son rapport universitaire sur les Cérambycidés

Texte : Philippe Carruette / Illustration : Cécile Carbonnier

Le Paon-du-jour (Aglais io), voilà un des papillons diurnes les plus communs de notre région. Il est aisément identifiable à sa couleur orangée avec ses ocelles sur les ailes, qui rappellent celles des plumes de la queue du paon, l’oiseau cette fois-ci ! À l’inverse, leur revers brun fait penser à une feuille morte, facilitant son mimétisme au repos. 

Peu exigeant, il butine une grande variété de mets sucrés : nectar trouvé sur les chatons de saules ou sur les pissenlits, sève des arbres ou, comme son cousin le Vulcain, fruits blettes. Les œufs, au nombre de plusieurs centaines, sont pondus au revers des feuilles d’ortie ou de houblon sauvage, et éclosent au bout de deux à trois semaines. La chenille est moins connue. À son stade définitif, elle est noire brillante ornée de points blancs avec des rangées de soies éperonnées – mais non urticantes – lui donnant une allure de fil barbelé en perpétuel mouvement.

Le Paon-du-jour hiverne à l’état adulte pour les individus de la deuxième génération estivale. C’est bien lui que vous voyez à l’automne tenter de rentrer dans vos dépendances ou même dans votre maison pour trouver un lieu d’hivernage tempéré. C’est lui aussi qui, avec le papillon Citron, sera un des premiers de sortie, parfois dès fin février.

Pensez à laisser quelques touffes d’ortie dans votre jardin pour le Paon, et pas que : en soupe ou en quiche avec des lardons, c’est aussi sympa pour nous ! Il est certes encore commun mais des cantons suisses ont décrété sa protection au vu de sa baisse drastique…

Texte : Philippe Carruette / Illustration : Benjamin Blondel

Voguant de pâquerette en pissenlit, un drôle de petit insecte vert métallique, aux cuisses renflées comme celles d’un sprinteur du Tour de France, se délecte de pollen. Notre “cycliste” bodybuildé n’est autre que l’Œdémère noble (Oedemera nobilis), un coléoptère mesurant de 8 à 12 millimètres, aux antennes filiformes ; on le reconnaît à ses élytres mous se rétrécissant vers l’arrière et ne recouvrant pas la totalité de l’abdomen… un peu comme s’il avait enfilé un maillot trop court ! Les mâles ont les fémurs des pattes postérieures particulièrement développés, ce qui leur donne cette allure de Popeye caractéristique. 

Dans la région, on peut aisément observer les adultes de fin avril à début août sur les fleurs où ils se ravitaillent, en lisière de bois ou dans les prairies. Ils jouent donc un rôle important dans la pollinisation. Les larves, quant à elles, sont xylophages, et vivent au sol, dans les branches, les tiges ou les racines en décomposition. En tant qu’organismes saproxyliques – c’est-à-dire dépendant du bois mort – elles participent ainsi, en coéquipières dévouées du vivant, au recyclage de la matière organique !

Texte et illustration : Cécile Carbonnier

C’est fin avril début mai que l’on a la chance de voir réapparaître ces superbes coléoptères que sont les Hannetons communs (Melolontha melolontha). Mais cette année, avec le froid de mai, ils semblent avoir retardé leur sortie. 

Le Hanneton commun fait partie de la famille des Scarabées (240 espèces en France) caractérisés par leurs antennes terminées en massues lamellées, plus longues chez les mâles. Il est surtout actif au crépuscule, même si on peut le voir en plein jour dégustant les feuilles des arbres. Les adultes volants (bien lourdement !) vont vite pondre 20 à 30 œufs dans les sols meubles, à 10 centimètres de profondeur. Les larves naîtront fin juin : ce sont les fameux vers blancs peu appréciés des jardiniers ! Elles vivront quatre ans de croissance souterraine, hibernant à la saison froide, et consommant aux beaux jours des racines. 

Mais on est loin aujourd’hui des pullulations et des densités d’antan où, quand j’étais enfant, on accrochait délicatement un fin fil à une de leurs pattes pour en faire… des cerfs-volants naturels, que l’on prenait bien soin de relâcher librement ensuite !

L’animal à tous les stades est pourtant une ressource alimentaire pour nombre de prédateurs comme les taupes, hérissons, musaraignes, blaireaux ou cigognes. Le Faucon hobereau qui revient tout juste de migration, faute encore d’abondance de libellules, le déguste en vol, en se débarrassant des élytres qui virevoltent dans une ultime pirouette.

Texte : Philippe Carruette / Illustrations : Alexander Hiley, Philippe Carruette

 

La Pudibonde ou Patte étendue (Calliteara pudibunda) est un gros papillon nocturne beige, plutôt velu, volant entre avril et juin, bien présent dans les boisements de feuillus du Parc. La femelle est plus grosse que le mâle (55 à 60 mm d’envergure), plus claire avec un volumineux abdomen au printemps pour la ponte de plusieurs centaines d’œufs. Comme tous les papillons de la sous-famille des Lymantriinae – une quinzaine d’espèces en France – l’adulte ne se nourrit pas faute de trompe.

Mais c’est sa chenille qui est la plus connue. Elle ne passe pas inaperçue, surtout la forme de couleur jaune fluo avec des touffes de poils blancs peu urticants, faisant penser à des blaireaux de rasage, ou à un punk flashy… au choix ! Elle se nourrit tranquillement des feuilles de toutes sortes de feuillus et met plus de deux mois et demi à se métamorphoser en papillon, enroulée dans une feuille comme dans une sacoche. C’est d’ailleurs la chenille qui a donné son nom français à l’espèce : dérangée, elle fait le gros dos et rentre timidement sa tête dans l’avant du corps.

Texte et illustration : Philippe Carruette

Le Xylocope violet (Xylocopa violacea) ou Abeille charpentière est un insecte de la famille des Apidae. Sa taille impressionnante, sa couleur sombre et les beaux reflets violacés métalliques de ses ailes à balancier peuvent faire penser à un coléoptère, mais c’est bien une abeille solitaire. Les adultes sont nectarivores, butinant les fleurs grâce à leur trompe robuste. 

Les femelles, munies de fortes mandibules, creusent des galeries dans le bois mort ou vermoulu… d’où leur nom ! Elles y pondent quelques dizaines d’œufs – un par loge – et déposent un mélange de nectar et de pollen pour nourrir les larves.

Même si le Xylocope possède bien un dard, il n’est pas du tout agressif. Les adultes nés en début d’été hibernent et ne se reproduisent qu’au printemps suivant.

Texte et illustration : Philippe Carruette

Zoom sur un petit papillon diurne bien courant dans nos campagnes et sur le parc : le tircis. Il est visible de mars à octobre, c’est donc un des derniers papillons que nous pouvons voir par journées ensoleillées.

En anglais, il est appelé « speckled wood » qui signifie « le bois tacheté », de par sa couleur brune et ses tâches jaunâtres rectangulaires sur le dessus. La face inférieure de l’aile est brun-gris avec des motifs qui lui permettent une homochromie des plus parfaite, telle une feuille morte. Les deux sexes sont semblables pour une taille relativement petite : entre 3,8 et 4,4 cm.

Ce papillon  recherche  des  milieux  herbacés  composés  de  poacées (graminées) bordées de zones arbustives  et arborées. Les prairies et les allées arborées du parc lui sont donc plutôt attractives.

Les poacées sont l’unique support de développement des chenilles du tircis. Comme beaucoup de papillons, et pour de nombreux autres insectes, les tircis ont leurs plantes hôtes, des plantes liées à l’insecte. La plante hôte est ainsi un « lieu » de reproduction, où sera déposée la ponte et qui servira de nourriture aux larves jusqu’à leur croissance jusqu’à leur prochain stade de vie.

Les imagos se retrouvent fréquemment au sol ou sur des feuilles basses afin de profiter des rayons de soleil. Dès que nous lui faisons de l’ombre, hop,  il s’échappe et cherche un nouveau coin de lumière.

Le mâle à un comportant territorial assez marqué et va jusqu’à pourchasser ses congénères s’aventurant sur son territoire.

A la différence des autres espèces, ce papillon n’est pas amateur de nectar. Il préfère se délecter de la sève des arbres ou du jus sucré des fruits bien mûrs.

 

Texte : Léa Coftier

Tapi dans les fleurs blanches d’une Eupatoire, un redoutable prédateur attend patiemment sa proie… Syrphes et abeilles, prenez garde, car la Thomise variable (Misumena vatia) est en chasse ! 

Cette petite araignée à l’abdomen tout arrondi, à peine plus grande qu’un grain de riz, aime se poster à l’affût sur les plantes mellifères surplombant la végétation environnante. Pas besoin de tisser de toile. Les insectes gourmands, attirés par les puits de nectar, se font prendre au piège : à peine se posent-ils sur la fleur, promesse de festin sucré, que notre arachnide sort de sa torpeur ! En un éclair, elle se précipite sur une mouche crédule, l’agrippe entre ses deux longues pattes antérieures, et l’envenime. Puis elle retourne dans sa cachette mortelle, se déplaçant latéralement comme une étrille… Il faut dire qu’avec sa paire de “pinces” et sa démarche de travers, la thomise porte bien son surnom d’araignée-crabe

Mais pourquoi diable les butineurs ne l’ont-ils pas repérée ? Sûrement parce qu’elle est douée d’une capacité de camouflage imparable : l’homochromie. Elle change de couleur en fonction de son terrain de chasse ! Ainsi, sur la corolle d’une achillée, la thomise devient toute blanche, tandis que sur un solidage, sa livrée se teinte en jaune. Cette formidable transformation – qui prend tout de même plusieurs heures – est due à la sécrétion puis au transfert d’un pigment liquide dans la couche externe du corps. À vrai dire, cette faculté lui servirait davantage à se cacher de prédateurs éventuels, qu’à tromper ses proies capables de capter les ultraviolets… Quoi qu’il en soit, la belle immaculée n’aura pas échappé à notre regard comblé ! 

Texte et illustrations : Cécile Carbonnier