Des billets sur l’actualité saisonnière des oiseaux, des observations naturalistes, des données inédites de baguage… vous pouvez également soumettre vos observations et photos.

Pas d’inquiétude, il n’y a pas de bêtes roses à groin ou de hordes de malveillants qui balancent leurs déchets en bord de route qui sont arrivés sur le Parc du Marquenterre ! C’est juste une étrange chenille qui traverse le sentier près de la Maison du Parc : c’est celle du Grand Sphinx de la Vigne (Deilephila elpenor) dont la chenille est aussi baptisée… Grand pourceau ! Son aspect est en effet bien étrange. Quant on la touche,  elle peut tout aussi bien affiner sa tête à la manière d’un serpent très réaliste, la balançant de gauche à droite. Elle peut aussi la gonfler pour bien mettre en valeur les ocelles comme des yeux bien sévères ! Bien entendu notre bluffeuse est totalement inoffensive ! Elle est active en août et se nourrit sur le site sur les gaillets, épilobes, salicaires, plantes nombreuses sur le bas marais (et non il n’y pas de vigne sur le Parc !).

Elle se différencie de celle du Petit Sphinx de la vigne par la présence bien visible de la corne postérieure typique des sphinx. Quant elle est toute marron comme sur la photo, elle est à son dernier stade larvaire et sa « randonnée » sur le sentier était une recherche d’un endroit pour se métamorphoser en chrysalide dans le sol. Le papillon est superbe avec sa grande taille (jusqu’à 65 mm d’envergure pour les femelles) et ses nuances fragiles de rose pâle et vert tendre. Une vraie aquarelle vivante ! Quant à Elpenor que l’on retrouve dans son nom latin, c’était un compagnon de voyage d’Ulysse et il s’est vu transformé… en cochon par la magicienne Circé de l’île grecque d’Eéa. La boucle est bouclée… !

Texte : Philippe Carruette – Photo et vidéo : Gaëlle Micheli.

Depuis fin août dans le cadre du programme PHENO (phénologie de la migration) les bagueurs picards baguent des centaines de Fauvettes à tête noire. Que se soit sur le Parc du Marquenterre, à Cayeux sur Mer ou en vallée de la Somme cette espèce a actuellement son pic de migration. Après une longue période de vent d’ouest, les légers vents d’est ont favorisé les passages nocturnes de ces oiseaux les premiers jours de septembre. Les doigts de bagueurs se retrouvent tout… violet avec les fientes des oiseaux qui se sont gorgés de mûres et de baies de sureau ! Ces baies sucrées et hydratantes sont 100% énergétiques et permettent à la fauvette en quelques jours de prendre 7 à 8 grammes soit près d’un quart de sa masse maximale (jusqu’à 25 grammes). Pour une fois, on a affaire à un passereau en augmentation. Espèce ubiquiste, à dominance forestière, assez résistante aux variations climatiques et au régime alimentaire large, ces populations ont augmenté de 20% en vingt ans. Elle fait partie des rares espèces généralistes qui tire profit de l’augmentation des sols forestés et des changements de climat. Nombre d’oiseaux notamment allemands vont ainsi même passer l’hiver en Angleterre et probablement dans le nord de la France plutôt qu’hiverner dans le Magreb ou le sud de la péninsule ibérique.

Texte et photos: Philippe Carruette.

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En bref : 437 Barges à queue noire, 372 Canards souchets, 341 Spatules blanches….

Tout comme les Hérons et Aigrettes, les adultes de Cigognes blanches nourrissent systématiquement leurs poussins dans le nid  par régurgitation. Chaque poussin doit ainsi « jouer des ailerons » pour récupérer le maximum de nourriture face à ses frères et sœurs, véritables concurrents à la survie, notamment lors des périodes de disette. Lorsqu’ils sont volants, les jeunes reviennent durant quelques jours au nid dans l’espoir de se faire encore nourrir. Certains parents continuent cet apport de nourriture aux jeunes parfois pendant deux à trois semaines, d’autres sont plus expéditifs dans l’émancipation.

En 40 ans seuls un couple de cigogne, il y a une dizaine d’années, fut observé en train de régurgiter au sol pour des juvéniles bien volants ce qui est exceptionnel et lié à une spécificité individuelle.  Ce comportement s’est réitéré cet été avec a priori la même femelle (baguée aux Pays Bas) avec deux jeunes bien volants que nous avons bagué fin juin. L’anguille particulièrement grosse (et surement encore vivante !) fut bien délicate à déglutir !

Texte : Philippe Carruette – Photo : Maëlle Hello – Vidéo : Gaëlle Micheli.

Sur le Parc, les rassemblements de Barges à queue noire sont importants en ce début septembre (plus de 450 oiseaux). Ce superbe limicole de grande taille nous arrive soit de la lointaine Islande, soit des Pays Bas ou d’Allemagne. A cette époque, la majorité des oiseaux porte déjà le plumage hivernale grisâtre même si certains nicheurs plus tardifs sont encore bien marqués de roux sur la poitrine. Les oiseaux islandais ont tendance à se nourrir sur l’estuaire alors que les oiseaux d’Europe continentale cherchent plus les prairies et bas marais arrière littoraux. Mais en Picardie maritime en période de migration les deux sous espèces se mélangent et forment des groupes importants notamment sur le Parc du Marquenterre.

La population nicheuse française est particulièrement menacée avec à peine 150 couples et les hivernants en augmentation tournent autour des 25.000 oiseaux concentrés uniquement sur dix grands sites principalement en façade atlantique dont la moitié en baie de l’Aiguillon en Vendée ! Grâce au baguage couleur ont a prouvé récemment que de rares oiseaux de la sous espèce continentale hiverne maintenant en baie de Somme au lieu de descendre jusqu’en Afrique de l’Ouest (Sénégal, Guinée Bissau…). Pour la première fois dans la région, une Barge finlandaise a été récemment notée sur le site. Baguée poussin avec des codes couleur le 3 juin 2018 à Liminka au sud d’Oulu (nord du golfe de Botnie finlandais), elle est observée le 15 août 2018 au Parc du Marquenterre. Une grande fidèle du Parc baguée Rouge/Blanc (patte gauche) – Vert pistache/Orange (patte droite) est de nouveau observé ce mois d’août au poste 6, il s’agit d’un mâle adulte bagué dans le sud de l’Islande le 13 juillet 2011. Durant la fête de la Science où nous intervenons sur la migration elle est devenue « une star de la migration » auprès des collègiens de Crécy, Domart et Rue.

Le nom de Barge n’a rien à voir avec un quelconque bateau ou « folie aviaire ». Cela viendrait du gaulois « bardal » (parler à voix forte) ou du provençal « barja » (bavarder) lien avec les étranges et incessants gazouillis qu’émettent les oiseaux quand ils se nourrissent frénétiquement en groupe sur les vasières.

Texte : Philippe Carruette – Photos : Alexander Hiley.

NOUVEAUTÉ : venez participer à un recensement d’oiseaux sur 1 journée !

Formez une équipe, sillonnez le Parc à l’affût d’un maximum d’espèce de 9h à 17h… et faîtes les comptes ! Un moment palpitant et passionnant, inscrivez-vous vite places limitées !

Participer au Big Day Marquenterre

Le Sphinx de l’Euphorbe est un papillon nocturne assez commun sur le Parc du Marquenterre. Il a l’habitude néanmoins de voler de jour. Si vous l’approcher de trop près, il se met à écarter les ailes et à « vrombir » pour vous impressionner ! Sa chenille est très voyante (verte à orangée selon la maturité avec de gros cercles blancs et la « corne » à l’arrière, apanage des Sphinx). Au Parc, elle se nourrit sur l’Euphorbe maritime (Euphorbia paralias) poussant sur les dunes blanches. Ses couleurs avertissantes montrent qu’elle est aussi toxique que la plante.

Texte : Philippe Carruette – Photo : Michèle Peter.

On connaissait la patience légendaire des parents Spatules, qui tolèrent que leurs jeunes Tanguy les harcèlent jusque sur les zones d’hivernage africaines pour avoir à manger, dodelinant de la tête sans discontinuer. On savait aussi que de nombreux passereaux, tels les Pinsons, continuent à nourrir au sol leurs poussins fraîchement sortis du nid. Mais observer une quémande de Martin-pêcheur juvénile, alors qu’il sait parfaitement voler – et, par là même, pêcher – ce n’est pas banal ! Spectacle rare auquel nous avons pu assister sur le marais d’eau saumâtre du poste 1, par une chaude après-midi d’août…

Un sifflement bref et perçant se fait entendre, puis un éclair bleu fend l’air : Monsieur Martin cherche à manger. Perché sur un poteau de la clôture, il scrute attentivement les alentours. Tout à coup, il plonge, percutant violemment la surface de l’eau : belle prise ! On voit briller au bout de son bec un petit poisson, qu’il assomme illico avant de l’avaler tout cru dans le sens des écailles.

Le scénario se répète quand, soudain, un second flash bleu apparaît. Il s’agit d’un jeune – le plumage est plus mat que celui de l’adulte aux reflets prismatiques – qui, surprise, rejoint le premier et se met à écarter les ailes, corps ramassé, bec entrouvert, en posture typique de quémande alimentaire.

Généralement, les juvéniles se font rapidement houspiller par leurs parents, qui leur signifient ainsi qu’il est temps de se débrouiller seul. Le comportement observé ici est donc étonnant à plusieurs égards : non seulement le petit n’a pas quitté Papa après la dispersion qui succède normalement à la période de nidification, mais en plus ce dernier accepte sans broncher que son ado lui réclame le dîner.

Rappelons au passage que cet oiseau niche dans un terrier qu’il creuse lui-même dans la berge d’un cours d’eau. Le duo père-fils (ou fille) du Marquenterre pourrait venir des marais arrière-littoraux, ou des rives pentues de la Maye. Mâle et femelle ravitaillent leurs petits nidicoles à tour de rôle pendant environ quatre semaines, jusqu’à ce qu’ils sortent de terre pour s’alimenter de façon autonome. Une fois n’est pas coutume, l’émancipation de notre flèche rousse et bleue tarde ici à venir…

Quoiqu’il en soit, cette sympathique partie de pêche en famille permettra, à coup sûr, d’achever la formation du jeune Martin à la capture d’alevins… et finira de nous régaler les pupilles !

Texte : Cécile Carbonnier – Photos : Mélanie Siron, Alexander Hiley.