Des billets sur l’actualité saisonnière des oiseaux, des observations naturalistes, des données inédites de baguage… vous pouvez également soumettre vos observations et photos.

Amis du Marquenterre,

Vous aviez participé pour certains à notre première édition en 2018 ! Le Big Day revient… avec un objectif encore plus fou sur le nombre d’espèces d’oiseaux comptabilisées en une seule journée !

Quand ?

Le 28 septembre de 9h à 17h

Comment ?

Une fois l’équipe formée (en avance ou le jour J), comptabilisez toutes les espèces que vous observerez. Attention, pas la peine de cocher le Bulbul des marais !

S’inscrire ?

Carte d’adhérent à jour (gratuit) ou s’acquitter du droit d’entrée (10,50€/ad)

Réservation OBLIGATOIRE avant le 25 septembre auprès de guidenaturemarquenterre@baiedesomme.fr

Informations complètes : http://bit.ly/BigDayMarquenterre2019

A très bientôt ! On vous réserve quelques espèces rares…

Sur les dunes grises, il y a un bel arbre qui mérite tout notre attention. Tronc tortueux, port “à genoux” malmené par les vents d’Ouest, le Fusain fait office de vieux monument végétal. Il ne vit pourtant guère longtemps et sa croissance est rapide, toujours à la recherche de la lumière – on parle d’espèce héliophile

Ce petit arbre est surtout remarquable par ses fruits à l’automne, des capsules roses laissant voir à maturité des graines orange toxiques : les fameux bonnets d’évêque dont on faisait, enfant, des colliers baba cool ! Son feuillage prend aussi des teintes rougeâtres du plus bel effet.

Il était surtout connu pour son bois carbonisé en vase clos produisant un charbon apprécié des dessinateurs ; quant à son bois naturel, lui est encore utilisé en horlogerie.

Plusieurs espèces de chenilles de papillons nocturnes apprécient ses feuilles pourtant toxiques, comme celle de la Phalène du fusain (Ligdia adustata) présente sur le Parc.

Texte et illustrations : Philippe Carruette

La Sterne caugek a effectué de nombreuses tentatives de nidification au Parc ; jusqu’à maintenant aucune n’avait abouti… Dès 1985 elle montre des comportements de reproduction et depuis 1997, l’espèce niche, mais sans succès, malgré des efforts de gestion en sa faveur. Installée parmi la colonie de mouettes, cachée dans la végétation et protégée des prédateurs terrestres par la clôture de l’observatoire n°1, il semblerait que cette année elle ait enfin trouvé les conditions idéales pour mener à bien sa reproduction.

Début juin, une vague de 143 individus est observée en stationnement ; quelques jours plus tard, leurs cris rauques et puissants résonnent, les marches frénétiques et les échanges de poissons sont de plus en plus réguliers. Huppes hérissées, la cérémonie a commencé : un préalable à l’installation de couples nicheurs. Une vingtaine d’individus sont couchés au sol les jours suivants, la nidification se confirme. Cette petite colonie nous arrive très certainement du hâble d’Ault après qu’elle a subi un dérangement aujourd’hui inexpliqué. Suite à l’abandon soudain de ce site, certains individus se seraient réfugiés au Parc. C’est un comportement souvent observé, une colonie entière – ou seulement l’une de ses parties – peut transférer ses quartiers à la suite de perturbations humaines ou d’une très forte prédation.

Fin juillet, le nombre de naissances s’élève à une dizaine d’oiseaux parvenus à l’envol. Durant 5 jours environ, nous avons été témoins du déplacement d’un îlot à l’autre des adultes, accompagnés des juvéniles capables de marcher. La présence de rats surmulots a pu stresser et perturber les oiseaux. D’ailleurs les parents restent toujours vigilants, ils escortent les jeunes qui quittent le nid et explorent les alentours. Capables de former des crèches, des dizaines d’individus participent à cette surveillance. Si le groupe s’envole suite à une perturbation, les juvéniles se retrouvent seuls et courent s’enfouir dans la végétation ! Il est néanmoins possible que certains poussins issus des dernières éclosions aient pu être abandonnés.

Ajoutons qu’à cette date, les caugeks sont en pleine course contre la montre : une fois les jeunes prêts à suivre les adultes, elles décident de partir afin d’éviter une migration tardive. Dès que le dernier poussin a su prendre son envol, le grand départ a eu lieu. Déjà en route vers les quartiers d’hiver, nous leur souhaitons un beau voyage et nous espérons revoir le bout de leur joli bec l’année prochaine.

Texte et illustrations : Gaëlle Micheli

La dune grise – ou fixée – n’est plus en contact direct avec la mer et les embruns, à l’inverse de la dune blanche mobile. Elle est caractérisée par une végétation rase formant une pelouse grise en période estivale, d’où son nom. 

Sur le Parc, 80% des espèces de mousses et lichens – la strate bryo-lichénique – sont adaptés à ce milieu aride, quasi désertique. La plus connue est la Tortule des dunes (Syntrichia ruralis var. ruraliformis). Elle peut se laisser dessécher totalement pendant des mois, ne profitant que de l’humidité de l’air. Mais dès l’apparition d’une averse, elle reverdit comme par magie et déploie ses feuilles fluorescentes en forme d’étoile !

Tortule des dunes

Empêchant le sable de voler, c’est la base de la production d’humus qui va permettre l’installation de plantes pionnières, comme la rare Pensée de Curtis (Viola tricolor subsp. curtisii), le Poivre des murailles (Sedum acre) aux feuilles charnues, qui sont autant de réserves d’eau, ou l’Erodium des dunes (Erodium cicutarium subsp. dunense) aux racines profondes captant l’humidité. Le Myosotis hérissé (Myosotis ramosissima), quant à lui, profite des zones ensoleillées enrichies par les déjections des lapins. Pour la petite histoire, Myosotis vient du grec myos (souris) et otos (oreille), allusion aux feuilles poilues rappelant les oreilles des rongeurs. Sur les secteurs les plus stables et anciens, la dune peut se colorer en jaune par la présence du Gaillet jaune (Galium verum) à l’odeur discrète de miel, souvent associé à la Canche blanchâtre (Corynephorus canescens) ou à la Fléole des sables (Phleum arenarium). On y retrouve aussi l’Asperge sauvage (Asparagus officinalis) qui était autrefois cultivée dans les dunes.

Myosotis hérissé

C’est sur cet habitat rare que des passereaux, comme le Traquet motteux, vont nicher dans les terriers de lapins, ou que les Linottes mélodieuses vont se gaver de graines d’Erodium. Ce milieu est particulièrement fragile et ne supporte aucun piétinement humain ou équin, mais se maintient en état grâce à la présence de fortes densités de lapins de garenne. Sa stabilité a facilité la plantation, entre les deux guerres, de Pins laricios qui ont conduit à sa quasi-disparition.

À la mort de toutes ces plantes à l’automne, le sol va encore s’enrichir en humus et laissera naître progressivement un nouvel habitat : la dune arbustive avec l’Argousier, le Troène des dunes et l’Églantier. À l’arrière, en descente de dune, va se développer une dépression : c’est la panne que l’on retrouve juste devant le pavillon d’accueil et qui se charge en eau lors de la montée de la nappe phréatique en hiver.

Texte : Philippe Carruette

Illustrations : Alexander Hiley, Nathanaël Herrmann


Durant les journées ensoleillées de juin à septembre, le longicorne ou capricorne Aromie musquée (Aromia moschata) est visible sur le Parc. On peut l’apercevoir sur les saules, les érables, les bouleaux mais aussi sur les ombellifères et les chardons. Cette espèce porte ce nom car elle produit une agréable odeur de musc.

Les imagos (formes adultes) ont une taille comprise entre 15 et 32 mm de long. Ils ont un corps aux couleurs métalliques, allant du vert au violet en passant par le cuivré ou le bleu. Les antennes des mâles sont plus grandes que leur corps, alors que celles des femelles sont plus courtes.

La reproduction de cette espèce se déroule en été. Les femelles vont ensuite pondre à l’aide d’un ovipositeur dans l’écorce d’un vieux saule. Les larves vivent dans l’arbre pendant 3 à 4 ans et se nourrissent de bois avant leur nymphose. Une fois métamorphosés en imagos, ces longicornes sortent de l’écorce et consomment alors la sève des saules, des érables et des bouleaux.

Texte et illustration : Romane Sauleau

Guides et visiteurs attendent chaque année ce spectacle avec impatience : les grandes marées estivales ont tenu toutes leurs promesses. Les 2, 3 et 4 août, peu après midi, des milliers de Courlis cendrés et corlieux, d’Huîtriers pies, de Barges à queue noire, de Bécasseaux variables, cocorlis et maubèches sont entrés dans le Parc. Chassés par la mer, ces grands voyageurs se sont posés quelques instants sur les bancs de sable disponibles, le temps de l’étale… 

Serrés les uns contre les autres, ils ont sagement attendu que la marée redescende, avant de retourner se nourrir dans les vasières de la Baie de Somme. Le tout dans une ambiance étrangement calme et silencieuse, au vu du nombre impressionnant d’oiseaux présents.

Fraîchement arrivés de Scandinavie, voire de Sibérie où ils ont niché, ces “aoûtiens” globe-trotteurs ne s’arrêtent parfois que quelques heures avant de reprendre le voyage vers leur zone d’hivernage européenne ou africaine. Adultes et jeunes profitent alors de cette pause salvatrice pour s’alimenter et se reposer, bien sûr, mais aussi pour s’adonner à toutes sortes de comportements de confort indispensables à leur survie : étirements, bâillements, toilette, graissage et lissage des plumes… Les soins corporels sont tout aussi importants que la nourriture et le sommeil pour achever la migration. À nous d’observer ces courageux limicoles le plus discrètement possible, pour ne pas les déranger lors de leur escale !

À vos agendas : les prochaines grandes marées auront lieu du vendredi 30 août au mardi 3 septembre (coefficient 113) ! 

Texte : Cécile Carbonnier

Illustrations : Pierre Aghetti

Dans la végétation herbacée et les lisières arbustives du Parc se cache un petit être jaune citron à pois noirs : il s’agit de la Coccinelle à 22 points (Psyllobora vigintiduopunctata), aussi appelée Coccinelle… marsupilami ! Ce sont ses couleurs caractéristiques qui lui ont valu ce joli sobriquet rappelant le célèbre personnage de Franquin. Le coléoptère, d’allure hémisphérique, mesure 3 à 5 mm ; il possède 11 points sur chaque élytre, et 4 autres positionnés en arc de cercle sur le pronotum, autour d’un triangle noir prolongeant l’écusson. 

Pas question de manger des piranhas comme son homonyme de Palombie : notre petit insecte est mycétophage, et se nourrit exclusivement de minuscules champignons de la famille des Erysiphaceae, responsables de la “maladie du blanc”, ou oïdium, dont souffrent certains végétaux ; on reconnaît les plantes malades à leur aspect pustuleux, ainsi qu’au feutrage “farineux” qui recouvre les feuilles et les fruits. Avoir un Marsupilami chez soi, c’est donc se prémunir contre ce cauchemar du jardinier !

En plus, cette coccinelle est indigène en Europe, c’est-à-dire qu’elle y est présente naturellement, contrairement à ses nombreuses cousines asiatiques, elles-mêmes introduites pour la lutte biologique… au détriment, malheureusement, des coléoptères autochtones. 

A noter que quand elle se sent en danger, la petite “bête à bon Dieu” est une excellente comédienne : elle fait la morte ! On dit alors qu’elle tombe en thanatose (du grec thanatos, la mort). Immobile, elle replie ses antennes, rentre ses pattes et se laisse tomber dans la végétation. Pas besoin de la force herculéenne ni de la queue démesurée du héros de BD : cette technique suffit à dissuader ses prédateurs, qui, généralement, ne raffolent pas d’insectes morts. Houba houba !

Texte et illustrations : Cécile Carbonnier

Point de sortie en ce moment sur le Parc sans rencontrer un Faisan de Colchide en train de défendre son territoire ou de se “promener” avec quelques poules – s’il est un coq dominant – au plumage bien plus discret. Familier des champs et des lisières de bois, visible surtout à l’automne, on oublie alors de le regarder, le considérant comme un oiseau “banal”. Pourtant en tant qu’espèce introduite, son histoire est bien plus longue que beaucoup d’autres… même s’il y a des chances qu’il provienne d’un relâcher d’élevage tout récent.

À l’origine le Faisan de Colchide – la Colchide est une région d’Arménie à l’est de la Mer Noire – niche naturellement du Caucase à la Corée, en passant par le Japon et la Chine. Les 52 espèces de faisans sont en effet tous asiatiques. Il fut introduit en France, en Italie et en Allemagne dès l’époque romaine comme oiseau d’ornement… et “invité” de marque aux fameuses orgies ! Mais c’est vraiment à partir du Moyen Âge et de la Renaissance qu’il s’est répandu en Europe.

Sa grande plasticité écologique lui a permis de coloniser tout le continent hormis les zones d’altitude et l’Europe du Nord et méridionale. Il sait tout aussi bien s’adapter aux milieux forestiers, qu’au bocage ou aux zones humides. Les adultes se nourrissent essentiellement de végétaux, mais on les a déjà vu capturer des batraciens comme le Crapaud commun.

Les dunes et marais du Marquenterre semblent parfaitement lui convenir et plusieurs couples nichent chaque année naturellement sur le Parc. C’est une des rares espèces que l’on peut considérer comme vraiment sédentaire.

Texte : Philippe Carruette

Illustrations : Alexander Hiley, Philippe Carruette