Des billets sur l’actualité saisonnière des oiseaux, des observations naturalistes, des données inédites de baguage… vous pouvez également soumettre vos observations et photos.

Comme chaque année, des opérations de baguage des poussins et des adultes d’Hirondelles rustiques ont lieu sur le Parc du Marquenterre et dans les environs, chez les particuliers. Les couples nichent sur les bâtiments techniques en arrière du pavillon d’accueil. Toutes les portes en bois sont munies de petites ouvertures permettant maintenant à plusieurs couples de s’installer. Certaines de ces ouvertures ont été réduites, du fait du passage nocturne d’une Chouette hulotte – qui niche avec succès dans les combles du pavillon, et qui prédate les nids et les oiseaux volants !

Les jeunes sont bagués à 11 jours et les adultes au filet. Nous allons aussi baguer des familles dans les villages des environs où cette espèce menacée semble un peu plus nombreuse qu’à l’accoutumée, grâce probablement à un printemps propice. Les adultes nicheurs présentent en effet une adiposité favorable, ce qui était vraiment rare ces dernières années.

Bien peu de jeunes et d’adultes reviennent l’année suivante. Néanmoins, en 2018, un jeune bagué à Canteraine (Rue) trois ans auparavant vint nicher sur le Parc. N’oublions pas que ces messagères de printemps nous reviennent d’Afrique centrale, alors laissons-leur une petite place dans notre environnement…

Texte et illustrations : Philippe Carruette

Sur les pelouses ensoleillées des pannes dunaires, aux abords des chemins sablonneux du Parc, fleurissent depuis quelques semaines de jolies étoiles roses à 5 branches : il s’agit de la Petite-centaurée (Centaurium), plante appartenant à la famille des Gentianacées. Les corolles s’épanouissent en ombelle, au bout d’une tige carrée d’une trentaine de centimètres garnie de quelques feuilles ovales opposées ; si on la regarde de plus près, on remarque les étamines jaunes qui s’enroulent en spirale au cœur de la fleur au parfum discret.

Ce genre regroupe trois espèces au sein de la Réserve naturelle : la Petite-centaurée commune (Centaurium erythraea), sa cousine délicate (Centaurium pulchellum) et enfin la Petite-centaurée du littoral (Centaurium littorale). Cette dernière, endémique nord-atlantique, est exceptionnelle et légalement protégée ; très rare et menacée, elle présente donc une valeur patrimoniale élevée et constitue un excellent indicateur écologique de la dynamique de certaines dunes. 

Petite-centaurée commune

Mais au fait, d’où lui vient son petit nom ? Le terme Centaurée, tout comme son surnom d’herbe à Chiron, renvoie à un épisode mythologique relaté par Pline : Héraclès, héros vénéré des Grecs – mais fort maladroit à ses heures perdues – blessa par mégarde son copain Chiron le Centaure. Afin de soigner son genou, l’être mi-homme mi-cheval se prépara un onguent à base de fleurs de… Centaurées ! Malheureusement, la pommade ne put le guérir, car la flèche qui l’avait atteint était empoisonnée par le sang de l’Hydre de Lerne. La douleur était telle que Chiron supplia les dieux de lui ôter son immortalité… 

Triste histoire… qui nous rappelle cependant que les plantes sont souvent utilisées en pharmacologie. Les Gaulois se servaient ainsi de la Petite-centaurée comme antidote aux morsures de serpents et aux maladies fébriles, d’où son appellation d’herbe à fièvre. Quant aux Romains, ils la surnommaient l’herbe de la bile de terre, en raison de son goût amer, qui stimulerait les sécrétions du foie : si elle n’est pas apte à soigner le poison de l’Hydre de Lerne, elle serait néanmoins un excellent purgatif, en témoignent différentes traces de son usage médicinal à travers les âges.

Petite-centaurée commune

La haute estime dont jouit la Petite-centaurée se retrouve dans un autre de ses sobriquets : l’herbe aux mille florins. L’étymologie est ici originale. En fait, la langue populaire transforma le terme centaurium en centum aurei, c’est-à-dire “cent pièces d’or”. Et la petite fleur rose était tellement appréciée que l’on multiplia par 10 sa valeur. Elle vaut bien cette surenchère !

Enfin, on l’appelle aussi Érythrée – comme le pays – terme vernaculaire signifiant “la rouge”, en raison de la couleur de ses fruits, des petites capsules rougeâtres. 

Parce que les botanistes semblent parfois vouloir nous perdre un peu, une dernière précision : le genre Centaurium est à distinguer du genre Centaurea, qui regroupe différentes plantes de la famille des Astéracées, dont le fameux Bleuet des champs, symbole de la mémoire et de la solidarité envers les anciens combattants, les victimes de guerre, les veuves et les orphelins. Mais ça, c’est une autre histoire…

Texte : Cécile Carbonnier

Illustrations : Romane Sauleau, Cécile Carbonnier 

Tout en cheminant sur les sentiers du Parc du Marquenterre, laissez-vous embarquer pour un voyage unique conduit par un duo hors du commun : un conteur et un guide naturaliste.

L’un connait le Parc comme sa poche et vous en fait découvrir les trésors ; l’autre vous emmène vers des contrées imaginaires dont il vous conte les secrets.

Des histoires d’oiseaux pour petits et grands… Une parenthèse enchantée dans un écrin de nature. Idéal pour une expérience partagée en famille !

Juillet : mardi 23 à 17h et samedi 27 à 20h30

Août : samedi 3 à 20h30 et mardi 6 à 17h

Septembre : mercredis 11 et 25 à 17h

Durée de la visite : 2h30

Sur réservation au 03.22.25.68.99

Tarifs : 22€/Adulte – 14€/Enfant

(Le tarif inclut le billet d’entrée au Parc pour la journée)

Affiche balade contée

Tandis que les derniers jeunes spatulons sont encore au nid, la majorité de leurs aînés ont pris leur envol. Ils se regroupent en des points stratégiques, zones bien dégagées aux eaux peu profondes du Parc.

Le premier envol ne signifie pas l’indépendance de ces jeunes : ceux-ci se feront nourrir encore quelques mois, jusqu’à l’obtention de leur bec d’adulte, véritable outil qui atteindra une taille respectable pour la pêche aux escargots, crustacés et autres petits poissons hantant les marais et les lagunes.

Mais en attendant, « mendier pour survivre » est la devise ! Et de ce fait, tous les moyens sont bons pour quémander le précieux contenu des jabots des adultes. À ce petit jeu le plus insistant sera souvent récompensé : poursuite aérienne, tapotement sur la commissure du bec des parents, harcèlement au sol sous forme de course poursuite, hochement de tête et cris de quémandage… Certains vont même jusqu’à bloquer de leurs ailes l’adulte se dérobant aux avances des petits mendiants !

Même si l’on peut observer les rejetons touiller, fouiller et becqueter dans l’eau, ces comportements de mendicité iront bon train jusqu’aux mois de septembre/octobre, que ce soit en halte migratoire ou encore sur les sites d’hivernage. Ce ne sera que cet hiver que les petits mendiants pourront enfin trouver pitance avec vivacité et dextérité grâce à ce bec exceptionnel donnant ce nom si particulier à l’espèce.

Texte et illustrations : Pierre Aghetti

Samedi 8 juin, au lever du jour. Les vents se déchaînent depuis la nuit, atteignant certainement plus de 100 kilomètres par heure. La traîne de la tempête Miguel, qui a sévi sur la côte atlantique, est cette fois pour nous. Dès le portail d’entrée du Parc, branches et feuilles recouvrent le chemin routier. C’est la gorge serrée que les équipes du Marquenterre font le premier tour des parcours pour dégager les sentiers des saules tombés. La pluie redouble d’intensité, les arbres craquent.

A la héronnière, aucun adulte de grands échassiers n’est présent, trop de vent pour se tenir statique sur les nids. Plus de 200 spatules sont « tassées » sur le premier plan d’eau en bas du point du vue, alors que des cigognes adultes s’abritent près du poste d’observation. Les poussins, seuls, se massent sur les nids. Les jeunes Aigrettes garzettes, presque volantes, appliquent une remarquable technique de protection : accrochées à une branche le long d’un tronc grâce à leurs doigts, elles se recroquevillent sur elles-mêmes, comme de véritables boules de neige duveteuses. Et elles tiennent ! Sur les parcours, les nids d’Avocettes, mouettes et échasses en bord de berge subissent les vagues du clapot et se recouvrent d’écume ; certains sont submergés.

Entre les postes 11 et 12 la plateforme accueillant un nid de cigogne avec deux poussins n’est plus visible. En accédant au site en fin de matinée, on découvre au sol les jeunes bien vivants, enfouis sous les branches du nid qui s’est écroulé sous la force des rafales. La nuit a dû être longue pour eux !

Ces deux poussins vont être nourris et gardés trois jours, le temps de bien faire les choses. Mardi, tôt le matin, la plateforme est redressée, haubanée, et les cigogneaux retrouvent leur nouveau nid douillet (merci Jérôme pour le foin !) ; poissons et viande sont aussi déposés. Les adultes sont-t-ils encore là ? Le stress leur a-t-il fait quitter les lieux ? A midi, de retour des postes, Margot Tharan, guide au Parc, observe avec joie un des adultes sur le nid, qui « papouille » ses petits ! Ils ne les ont pas oubliés ! Le 22 juin les deux jeunes – dénommés Daurade et Cabillaud – sont bagués par leurs sauveuses. Ils porteront les bagues vertes FHXW et FHXZ.

Nous avons réussi mais c’était loin d’être gagné ! Face au risque de se tromper, d’être discrédité, d’entendre « c’est la nature », « c’était écrit » ou « on te l’avait dit que ça ne marcherait pas »… Décider simplement d’agir sans avoir le doute du choix face à celui de l’immobilisme. La vie est toujours plus forte…

Merci à Amandine, Laëtitia et Cécile, pour avoir ramené les poussins, à Cédric, Francis et Clément pour avoir redonné un nid à ceux qui l’avaient perdu.

Texte : Philippe Carruette

Illustrations : Philippe Carruette, Gaëlle Micheli

Voilà une jolie petite orchidée – souvent moins de 30 cm sur le site – qui est assez rare sur le Parc et dans la Somme : l’Orchis pyramidal (Anacamptis pyramidalis). Elle se reconnaît facilement à son inflorescence de couleur rose pourpre, formant un épi conique pyramidal de fleurs serrées.

Comme pour la plupart des orchis, la pollinisation se fait par les insectes, en particulier les papillons diurnes comme l’Argus bleu et le Myrtil. On la retrouve notamment dans les prairies sableuses calcaires. Avec les températures élevées de l’été naissant, ces orchidées se sont transformées en véritables perchoirs pour les Escargots des dunes, qui se protègent ainsi de la chaleur du sol !

Texte et illustration : Philippe Carruette

Les parcours du Parc débutent par une petite ascension, qui nous élève jusqu’au point culminant du site… une vingtaine de mètres, ouf ! Ce premier observatoire repose sur un massif dunaire naturel appelé « dune boisée », bordé de Pins laricio. Se succède ensuite un ensemble d’habitats originellement éphémères et mobiles, sculptés par le vent, l’eau, la marée…

Ces habitats sont souvent menacés par les activités humaines malgré leur caractère à haute valeur patrimoniale.

Grâce aux travaux récents, la descente du point de vue principal a été modifiée rendant la pente plus douce. Mais surtout elle sera l’occasion de (re)-découvrir la dune grise, qui succède à la dune boisée. Ses tonalités de couleurs proviennent des mousses et lichens qui la composent. Les plantes sont particulièrement adaptées par leurs formes ou capacités de stocker l’eau. Cette pelouse rase et sèche se maintient grâce à une pression de pâturage des lapins lorsqu’ils sont suffisamment présents.

Merci de veiller à ne pas enjamber les ganivelles 😉

Dune grise

Le Blongios nain (Ixobrychus minutus) est l’un des plus petits représentants de la famille des Ardéidés, ne dépassant pas 38 cm. D’apparence semblable au Bihoreau gris, le mâle de Blongios possède une calotte et un dos noirs, et se distingue par sa taille et sa plage alaire blanche à beige. La femelle, quant à elle, est brune là où le mâle est brun, et possède une tâche alaire plus sombre ; quant aux juvéniles, ils sont plus ternes que la femelle.

En France, le Blongios nain est une espèce protégée qui niche principalement dans des roselières. Son aire de répartition est très étendue de l’Europe à la Russie en période estivale ; il retournera jusqu’au Sud du Sahara pour prendre ses quartiers d’hiver.

C’est un oiseau très discret en raison des milieux qu’il fréquente. On dénombre aujourd’hui environ 500 couples nicheurs sur le territoire Français, dont une dizaine dans notre département. Anciennement bien présent dans la vallée de la Somme, avec près de 230 couples en 1970, la population a connu une chute drastique dès 1980 avec 50 couples recensés seulement. Les raisons de cet effondrement sont inconnues, mais corroborent les données de la population nicheuse à l’échelle nationale qui connaît également un fort déclin depuis plusieurs années.

L’observation d’un individu prend donc toute son importance et mérite d’être soulignée ! En effet, l’espèce n’a été vue que 9 fois sur le Parc depuis 1974 : il s’agissait principalement d’individus juvéniles en phase de dispersion ou de migration très certainement, comme en septembre 2016. L’individu photographié le 26 mai 2019 est seulement le deuxième mâle observé au printemps depuis 1985 !

Texte : Julie Falampin

Illustrations : Adrien Leprêtre