Un pourceau sur le Parc
Pas d’inquiétude, il n’y a pas de grosses bêtes roses à groin ou de hordes de malveillants balançant leurs déchets en bord de route, qui sont arrivés jusque sur le Parc du Marquenterre ! Ce samedi 16 juillet, c’est juste une grosse et curieuse chenille qui traverse le sentier après le poste 10 : celle du Grand Sphinx de la vigne (Deilephila elpenor) dont la chenille est aussi baptisée… grand pourceau ! Les britanniques la nomment elephant hawk-moth, y voyant exotiquement une trompe d’éléphant plutôt qu’un groin de suidé !
Son aspect est en effet bien étrange. Quant on la touche, elle peut tout aussi bien affiner sa tête à la manière d’un serpent très réaliste, la balançant de gauche à droite, mais aussi la gonfler pour bien mettre en valeur les ocelles comme des yeux bien sévères ! Bien entendu, notre “bluffeuse” prenant sa face de bouledogue est totalement inoffensive. Elle est active en été et se nourrit sur le site de gaillets, épilobes, salicaires, plantes nombreuses sur le bas marais, et savoure même parfois les onagres. Eh non, il n’y pas (encore) de vigne sur le Parc !
Elle se différencie de celle du Petit Sphinx de la vigne par la présence bien visible de la corne postérieure typique des sphinx. Quand elle est toute marron comme sur la photo, elle est à son dernier stade larvaire, et sa “randonnée” sur le sentier s’explique par la recherche pressante d’un endroit pour se métamorphoser en chrysalide en s’enfouissant sommairement dans le sol. Le papillon qui va émerger en juin prochain est superbe, avec sa grande taille (jusqu’à 65 mm d’envergure pour les femelles) et ses nuances fragiles de rose pâle et vert tendre. Une vraie aquarelle vivante !
Quant à Elpenor, que l’on retrouve dans son nom latin, c’était un compagnon de route d’Ulysse qui s’est vu transformé… en cochon, par la magicienne Circé de l’île grecque d’Ééa. Et on dit que les voyages forment la jeunesse…!
Texte et illustration : Philippe Carruette